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La crypte et le fantôme

Lors d’un événement dramatique, difficile à traverser, pour des raisons qui peuvent être liées par exemple à la honte, à l’angoisse, à la douleur, si une personne n’a pas la possibilité de s’exprimer, elle va refouler l’évènement et les émotions qui s’y relient. Elle l’entoure de silence, le met, en quelque sorte, dans une tombe, une crypte psychique, pour qu’il n’en sorte plus jamais. C’est ainsi que naissent les secrets.


Il faut trois générations pour fabriquer un secret :

  • à la première l'événement ne peut pas être parlé (indicible)

  • à la seconde, il est pressentit mais on ne peut pas le nommer (innommable)

  • à la troisième, il n’est pas pensable (impensable), on a plus accès au secret et c'est là où les effets peuvent être les plus forts.

C’est davantage le fait de taire, de réprimer les émotions, que l’évènement en soi, qui fabrique le secret. Le silence qui entoure l’évènement empêche le questionnement.

Néanmoins, il laisse des traces (lapsus, peur, phobie, crispation, tension, réactions inappropriées, etc…), il "transpire", il agit en souterrain. Ce sont les descendants du porteur de la crypte, qui conservent les traces, les manques, qui portent le fantôme de cet évènement auquel il n'ont plus accès.

Il provoque des perturbations (dans la relation aux enfants en général), des réactions disproportionnées. Par exemple, si les questions d’un enfants frôlent le secret ou même, se situent en périphérie, cela peut provoquer une réaction de colère (mécanisme de défense face à la peur ou la douleur) et générer de la confusion, de fausses croyances (si mon papa se met en colère, c’est parce que je suis méchant), créer déséquilibre, perte de confiance en soi, etc….

Souvent on tait un évènement ,pour protéger les enfants. Mais un enfant à qui l’on ne répond pas ou que l'on rudoie s'il pose trop de questions devient timide, inhibé, il perd sa capacité à questionner, il ressent de la honte. Cette honte n'est pas la sienne, c'est celle du parent qui tait l'événement.


Il n’est pas toujours possible de savoir ce qu’il y a derrière un secret, mais l’important c’est de le nommer. De même, si le secret est révélé, on peut trouver ridicule l’évènement à l’origine de tant de silence, alors qu'on l'imaginait dramatique.

Dans les deux cas, ce qui est important dans le travail d’analyse c’est d’étudier les effets du secret. De comprendre quel chemin son fantôme a pris et quelles conséquences psychiques, physiques et relationnelles il a pu engendrer pour les descendants.


Pour aller plus loin :

Serge Tisseron « Les secrets de famille »,

Claude Nachin "les fantômes de l'âme"

Nicolas Abraham et Maria Törok "L'écorce et le noyau"

On doit à Nicolas Abraham et Maria Törok le concept psychanalytique du fantôme : « ils (les fantômes) ne sont pas les trépassés qui viennent hanter, mais les lacunes laissées en nous par le secret des autres » (Etudes freudiennes, 1975)










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